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Garou - 33.2 - La femme à la robe noire de jais

Rapport
1999-08-26



La femme à la robe noire de ténèbres

Il était tard pour une visite de ce type, à la Mordaunt Galery, mais tel était les termes de ce rendez vous nocturne, "Quand les âmes torturés de cette ville s'endormiront, nous nous retrouveront". Une jeune femme aux cheveux de jais et à la peau pâle comme la lune attendait dans une ruelle sombre, elle s'était apprêtée pour l'occasion. On ne reçoit pas si souvent un lycan  dans un lieu tel que celui-ci, pensait -elle. A vrai dire, il y a  pas si longtemps elles les croyaient  incapable de comprendre quelque chose à l'art et à l'occultisme mais visiblement , elle s'était trompé, du moins elle attendait de voir.

 

il arriva promptement, drapé dans une cape de belle facture noire et grise sur laquelle était brodé de nombreuses runes qui semblaient plus être là pour le genre. La capuche était rabattu sur son visage et il sortit d'une ruelle empli de ténèbres. On aurait dit un instant qu'il en faisait partie et qu'elle l'accompagnait. Il avançait sans bruit, comme un souffle, d'un pas décidé et l'obscurité ne semblait pas le gêner. A la  hauteur de la dame, il  enleva sa capuche et ils se regardèrent un instant comme figés, puis il la salua timidement mais avec courtoisie. La jeune femme lui rendit un signe de la tête et lui montra la direction à suivre sans dire un mot.

L'ambiance était courtoise mais un vent frais venait de s'engouffrer dans la ruelle. Quand deux êtres bénis par la nuit, deux âmes blessées aux plaies béantes et au cœur en sang se rencontrent, les ombres s'agitent et même le vent semble frémir de froid cherchant à s'échapper d'une telle étreinte.

Elle poussa la porte de la galerie et esquissa, une fois entrée, pour la première fois, un sourire fugace

"Bienvenue Artyom! " dit elle d'une voix mélodieuse comme si les sons avaient été emprisonné là au dehors et que dans ce lieu ceux ci venaient d' être libérés.

"Merci Éléonore, c'est un honneur !" Leurs douleurs semblaient avoir organisé ce rendez vous nocturne et même si tout les séparaient, une alchimie mystérieuse s'était cristallisé sans leur consentement dans cette nuit sombre.

Avec la grâce d'une reine, Éléonore montra la voie et avec enthousiasme présenta  toutes les œuvres de la galerie. Elle fut surprise par l’intérêt non dissimulé du méthis qu'elle  avait pris au premier abord pour un débile et un sauvage, mais il avait vraiment changé. Il avait surmonté sa condition, ses douleurs. Comment avait il fait ? Elle trouva ironique que ce soit par moments le thème abordé sur certaines de ces toiles , mais aussi et surtout parfois son inverse qui illustrait une chute irrémédiable dans les ténèbres.  Elle observait son aura , intriguée ; elle était à la fois blanche et noire, à la fois chatoyante et obscure, une aura singulière, inquiétante  et  fascinante. Il la regarda à ce moment là et ses yeux reflétèrent le néant, elle en eut des frissons et en fut comme hypnotisé l'espace d'un court instant.

Il prit le temps d'observer chaque œuvre et tout en demandant à la dame son ressenti , il en disséqua la substance intrinsèque tout en la reliant à ses connaissances occultes qui montraient l’œuvre sous un angle plus large, mêlé à sa propre expérience du vide et de la douleur qui était indéniable. Ce devait être même un maître en la matière  ! se disait elle . Qu'avait il pu donc subir  comme horreur .... durant des années certainement  pour être aussi pertinent ?  ....se disait la diaphane et éthérée Eléonore 

Jamais aucune personne n'avait eu ce regard sur ces œuvres  et elle en fut bouleversée, comme si ce lycan qu'elle pensait si primaire avait touché la substantifique moelle de son être, de sa vie, de son ressenti su sa condition vampirique, sur les ténèbres qu'elle avaient traversées et qu'elle traversait encore.

Certes Artyom n'avait aucune idée des techniques, ni des connaissances dans cet art, et cela se voyait mais il avait capté ce que l'auteur avait à en dire du moins à travers son expérience la plus sombre et selon la vampire, il avait du côtoyé les abysses à ce niveau là.

De son côté, Éléonore  lui expliqua avec éloquence toute la partie artistique qu'il lui faisait défaut pour avoir une vue plus complète de ces œuvres et  il en fut très intéressé. Il posa des questions pertinentes à  Éléonore qui pensait dans les premiers temps que ce serait rapide. Mais ce ne fut pas le cas et elle ne vit pas passer les heures, pire, elle y prit même du plaisir.

Artyom avait lui aussi de lourds préjugés et des appréhensions  sur la Dame qui s'envolèrent au gré de la visite, d'abord sur la réserve, il se lâcha peu à peu pour être en définitive très à l'aise. Il y avait comme une reconnaissance, une fragrance commune entre les deux êtres qui se scella par un fait rare.

A un moment donné, la visite et le partage des deux êtres attira  une Morrigane, un esprit de la sagesse occulte. qui avait la forme d'une femme voilée dans une robe noire d'un autre temps et qui était par endroit usée et qui virevoltait au dessus du sol , portant une lanterne. Elle écouta à distance en premier temps les dires des deux êtres puis moins timorée, elle salua Artyom d'un mot lugubre et  vint auprès d’Éléonore qu'elle éclaira de sa lanterne blafarde avant de lui poser sa main froide sur sa joue.

 

Artyom pour la remercier  de cette visite , lui  fit partagé cette expérience unique et rare en décrivant la scène, qu'elle relia à des sensations de frissons ou de chaleur au moment où le lycan les décrivait et où l'esprit interagissait avec la Toréador.

Éléonore attirait les esprits des ombres comme le méthis le faisait et il comprit pourquoi ,il ressentait un certain lien avec la vampire à moins que ce ne soit les lieux.....

Puis, la visite toucha à sa fin et les deux êtres repartirent dans les ténèbres comme ils étaient venus, se saluant discrètement et savourant chacun l'un et l'autre dans leurs esprits encore vivaces, l'essence de cette rencontre nocturne riche en sensations.